Réassurance post-COVID

Réassurance : enjeux futurs liés à réassurance post-covid

Sommaire

La pandémie de COVID-19 a agi comme un séisme dans l’industrie de la couverture des risques. Alors que les modèles actuariels peinaient à anticiper l’impact d’une crise sanitaire mondiale, les chiffres de l’Apref révèlent une réalité sans appel : 37 milliards de dollars de sinistres payés ou provisionnés mi-2021, avec une projection ultime pouvant atteindre 70 milliards. Un bouleversement qui interroge les fondements mêmes du secteur.

Les réassureurs, habitués à modéliser des catastrophes naturelles ou des accidents industriels, ont dû composer avec un risque systémique aux ramifications imprévisibles. La prise en charge de 43 % des coûts totaux – soit 16 milliards de dollars – par ces acteurs clés illustre leur rôle pivot. Mais cette crise a surtout mis en lumière les failles des approches traditionnelles face à des aléas globaux.

Comment transformer cet épisode en catalyseur d’innovation ? Les branches non-vie, initialement perçues comme les plus exposées, ne résument pas à elles seules les défis. La tarification des risques émergents, la mutualisation des données ou encore l’adaptation des contrats constituent désormais des chantiers prioritaires pour un secteur en quête de résilience.

Points clés à retenir

  • Facture totale des sinistres COVID-19 estimée entre 50 et 70 milliards de dollars
  • 43 % des coûts absorbés par les réassureurs mi-2021
  • Remise en cause des modèles de prévision des risques systémiques
  • Nécessité d’innover dans l’évaluation des risques transfrontaliers
  • Impact durable sur les stratégies de capitalisation du secteur

Contexte et mutation du secteur face à la pandémie

L’irruption du virus a révélé des vulnérabilités insoupçonnées dans les mécanismes de protection des acteurs économiques. Les entreprises et les clients ont découvert brutalement les limites des couvertures traditionnelles face à un risque sans frontières.

Impact immédiat sur les sinistres et la gestion des risques

Les chiffres de l’Apref montrent que 80 % des sinistres liés à la crise sanitaire concernent les pertes d’exploitation et les annulations. Cette concentration inédite a forcé les assureurs à revoir leurs grilles d’analyse en temps réel. Comment expliquer que seulement 20 % des réclamations proviennent de l’assurance de personnes, alors que la surmortalité atteignait 9 % en 2020 ?

Évolutions des statistiques et chiffres clés

Entre janvier et mai 2021, les arrêts maladie ont bondi de 30 %, touchant 13 % des salariés. Ces données, combinées à une hausse des coûts de gestion, ont poussé le secteur à accélérer l’adoption d’outils prédictifs. Une mutation rendue possible par l’intégration de technologies innovantes dans les processus décisionnels.

  • 56 000 décès supplémentaires en 2020 (Insee) remettent en cause les modèles actuariels
  • 30 % d’arrêts de travail en plus sur cinq mois (Malakoff Humanis)
  • 80 % des sinistres concentrés sur trois branches non-vie

Réassurance post-COVID : définitions et enjeux émergents

La gestion des risques sanitaires globaux révèle aujourd’hui des fractures méthodologiques. Les modèles historiques, conçus pour des aléas localisés, montrent leurs limites face à des crises aux impacts transversaux.

Les spécificités du risque pandémique

Le profil démographique de la COVID-19 bouleverse les référentiels existants. Arnaud Chevalier d’Aon France souligne :

« Les schémas Solvabilité II s’appuyaient sur des grippes saisonnières et la crise de 1918. Or, cette pandémie touche principalement des seniors peu couverts en assurance décès »

Cette divergence crée un cas d’école pour lesassureurs: comment évaluer un risque concentré sur une population moins assurée ?

Comparaison des modèles traditionnels et actuels

Trois écueils majeurs émergent :

  • Des projections basées sur des événements centenaires inadaptés aux réalités épidémiologiques modernes
  • Une tarification conçue pour des populations actives plutôt que retraitées
  • L’absence de mutualisation efficace entre branches assurance vie et non-vie

Romain Durand de Covéa précise :

« Les outils actuariels doivent intégrer de nouveaux paramètres : comorbidités, durée des hospitalisations, impacts économiques prolongés »

Cette évolution questionne la place des scénarios prospectifs dans les stratégies de couverture.

Les conséquences sur l’assurance vie et la prévoyance collective

Contrairement aux prévisions alarmistes, l’impact sanitaire sur les portefeuilles français révèle des mécanismes de résilience inattendus. Les chiffres de Swiss Re montrent une facture de 810 millions de dollars au premier semestre 2021 pour la branche Life & Health, bien en-deçà des scénarios catastrophe initialement redoutés.

Effets sur la mortalité et les portefeuilles assurés

Simon Rechatin de Swiss Re souligne :

« Les portefeuilles de prévoyance et d’emprunteur, majoritairement réassurés en France, ont absorbé le choc avec une surprenante modération »

Cette observation cadre avec les analyses ducomité Viequi pointent une structure démographique protectrice.

Le contraste international interroge : alors que la facture mondiale atteignait près d’un milliard en 2020, le marché hexagonal bénéficie d’une population active mieux couverte. Les assureurs français constatent ainsi une mortalité accrue concentrée sur des tranches d’âge moins représentées dans les contrats assurance vie.

Cette relative stabilité masque-t-elle des vulnérabilités persistantes ? Les professionnels travaillent désormais à intégrer des paramètres comme la prévalence des comorbidités ou la durée des hospitalisations dans leurs modèles. Une évolution qui pourrait redéfinir les stratégies de couverture pour les prochaines crises sanitaires.

Evolution des méthodes de souscription et d’underwriting

La crise sanitaire a accéléré une refonte complète des pratiques d’évaluation des risques. Les assureurs doivent désormais jongler entre l’héritage des modèles traditionnels et l’urgence d’intégrer des paramètres inédits.

Adaptation des critères face aux cas complexes

Simon Rechatin souligne : « Nous anticipons une analyse plus fine de la population assurée, notamment sur les nouveaux contrats ». Cette approche s’appuie sur des outils prédictifs capables de croiser comorbidités, habitudes de vie et exposition professionnelle. Un exemple concret ? Les entreprises du secteur logistique voient désormais leurs polices modulées en fonction de la localisation géographique de leurs entrepôts.

Les négociations avec les assureurs intègrent maintenant des données en temps réel sur la fréquence des sinistres. Pour les clients, cela se traduit par des questionnaires de souscription plus détaillés – une évolution notable dans un secteur où 73 % des contrats vie étaient encore standardisés en 2019.

Comment répondre aux attentes changeantes sans alourdir les processus ? La solution réside peut-être dans l’automatisation ciblée, combinant intelligence artificielle et expertise humaine. Une mutation qui redéfinit radicalement la matière première du métier : les données.

Articles récents